Il y a dix ans, l’inoxydable George Clinton balançait à tous ses dope dogs, How Late Do U Have 2BB4UR Absent?, un os énorme de vingt-quatre titres pas toujours digeste qui recyclait à peu de choses près tout ce que Le Chien Atomique avait pu toucher depuis le début de sa carrière. Dix ans plus tard (on passe sur le gênant Gangsters Of Love…), l’os est encore plus gros. Trente-trois titres, plus de trois heures de musique. Et, inévitablement, un bordel pas possible où l’Oncle George a empilé tout ce qui lui passait par la tête et sous la main.
Beaucoup de boites à rythmes et moins de batteries, George a laissé le hip hop prendre le pouvoir, malheureusement, pas toujours dans sa forme la plus glorieuse. Lui pardonnera -t -on un jour cet usage honteux et abusif d’auto-tune à bas prix ? Des titres qui bouclent sans fin, d’autres sortis du tiroir et à peine époussetés, des incursions technoïdes fadasses : l’écoute peut prendre des allures de tunnel sans fin. Mais, la lumière est parfois à l’autre bout, celui où l’on arrive presque miraculeusement sur un funk à la recette connue mais éprouvée, sur des pièces où des historiques viennent prêter saxo, trombone ou claviers forts, sur des déferlantes métalliques à guitare défouraillante qui redonnent fois en ce dingo de George.
Shake The Gate, c’est la chambre mal rangée d’un ado de plus de 70 balais. Un capharnaüm où sont entassés des gadgets inutiles et des trucs avariés mais aussi des madeleines qu’on adorait et sur lesquelles on retombe avec la sensation envahissante d’avoir mis la main sur ce qu’on cherchait depuis des lustres. Entrez sans frapper et faites le ménage vous mêmes…