Moitié du duo anglo-russe Hype Williams, Dean Blunt s’échappe pour une nouvelle aventure solo, qui voit sa musique prendre une tournure plutôt étrange, où les instruments classiques, tels que violons, harpes, guitares, choeurs, enrobent sa musique spatiale d’un écrin dépouillé, sur lequel les mots chantés/parlés susurrent de drôles de litanies, autour de la rupture amoureuse. Difficile de classer The Redeemer, voyage iconoclaste sur des terres en clair/obscur nous immergeant dans un paysage sombre et expérimental, où les mélodies semblent juste portées par sa voix aux inclinaisons parfois soul, parfois rap, parfois pop. Dean Blunt étonne par le parti pris miniaturiste de ses chansons flottantes qui évoquent tour à tour Bobby Womack, Isaac Hayes matinés d’expérimentations conceptuelles à la Planningtorock. The Redeemer demande une écoute au casque pour en apprécier tout le travail de production, où les silences eux mêmes ont toute leur importance, où les souffles esquissent des soupirs de lassitude et de mélancolie fêlée, où les mots jouent à cache-cache avec les tourments de l’âme. Dean Blunt signe un album à fleur de peau qui échappe avec une authenticité rare aux modes et aux hypes, véritable mise à nu d’un artiste en proie aux affres de la rupture et de la création. Vital.
Roland Torres