Rien d´étonnant alors que de retrouver dans Anything in return les ingrédients qui ont fait la réussite de ses précédentes recettes, à savoir une avalanche de sonorités psychées, le tout saupoudré par des vocals douces et lointaines. Mais si le menu reste classique dans son ensemble, Toro Y Moi ose étonner notre palais en prolongeant le virage pop de sa précédente composition. L´album démarre très fort, avec les quatre premiers titres que sont Harm in Change, Say That, So Many Details et Rose Quartz. Les enchainements sont édifiants. Les mélodies, délicieuses, resteront longtemps ancrées dans les mémoires. Quant à la cuisson, rien à dire, elle est parfaite : planants et cadencés, les premiers morceaux du disque sont des moments de bravoure new-wave comme on les adore. Rose Quartz, le bijou du disque, est en ce sens une véritable merveille de pop électronique, sorte de drogue de synthèse que l´on se plait à abuser et à chantonner à tue-tête : un classique instantané. La bouche pleine (gardez votre mauvais esprit pour vous), nous nous rinçons le palais avec Touch et Cola, balades atmosphériques qui font retomber l´adrénaline et nous permettent d´appréhender la suite dans les meilleures conditions. Succulent.
Enfilant son tablier des grands soirs, Chaz Bundick semble avoir malheureusement tout misé sur l´apéro et les entrées, en oubliant que les desserts font également un grand repas. En effet, aussi succulente soit-elle, la première partie de l´album ne peut en rien nous faire oublier le goût amer de sa suite. Loin d´être mauvais, les morceaux que sont High Living et Grown Up Calls manquent peut-être d´assaisonnements, pour ne pas dire de folie, et finissent rapidement par lasser. Heureusement, le Cake sucré qui ouvre le bal des desserts ravira les plus gourmands d´entre nous, tant la richesse de ses arômes est évidente – un refrain enjoué accrocheur, des sonorités aimantées, parfaites pour faire de la piste la compagne heureuse du quotidien. Las, la fin du disque, elle, est si calorique qu´elle pourra devenir écoeurante pour ceux qui ont la malchance d´avoir le foie fragile : How´s It Wrong fatigue alors que Never Matter, bourré de matières grasses végétales hydrogénées, paraît superficiel, tant ses beats faussement groovy accouchent d´un vacarme anxiogène.
Par Bruno Rit