Si la plupart des gangs sont très pointilleux sur certains principes tels que << le territoire et ses frontières, c´est sacré >>, les Ghetto Brothers, proches des milieux portoricains nationalistes, prônaient à l´inverse l´éradication des junkies, des programmes de petits-dèj pour tout le monde, le nettoyage des parcs et terrains vagues et l´organisation de concerts en pleine rue bref un gang avec des tatouages malabar de Gandhi et Mère Teresa sur les bras.
Cette ambiance bon enfant se retrouve aussi dans le son des Ghetto Brothers, composé des trois frères Melendez, qui enregistrent ce Power-Fuerza en 1971. Une période de partouze stylistique où le funk qui sort à peine de son adolescence couche avec n´importe quel musique : le rock, la musique latin ou la soul, quand ce ne sont pas les trois en même temps. Cette galette illustre à merveille cette orgie sonore où les trois frères font ici voler en éclat les étiquettes. Si les premières tracks (Girl From The Mountain, There Is Something In My Heart et Got This Happy Feeling) baignent dans un rock assez sixties, le reste trempe clairement dans le métissage funk et latin (Mastica Chupa Y Jala et Ghetto Brothers Power) ou la soul avec I Saw A Tear.
La carrière du groupe ne connu pas de suite discographique. Le leader, en voulant empêcher une rixe entre deux bandes rivales, mourut peu de temps après la sortie de ce Power-Fuerza. Les Ghetto Brothers ne demandèrent même pas vengeance mais instaurèrent à la place d´une vendetta sanglante, un traité de paix dans le South Bronx. Un épisode auquel participa Bambaataa et qui devint une source d´inspiration quand il créa la Zulu Nation.
Par Julien Renou