LEMDI & MOAX : NÉGROPOLITAINS ET FIERS DE L’ÊTRE

Alors que leur album « Négropolitain » était sorti en 2013, ses auteurs Lemdi & Moax avaient remis le couvert en nous offrant en mai dernier un EP de remixes de certains morceaux de l’opus, plus un inédit.

C’est depuis le Val Mobb (Val Maubuée) en Seine et Marne que le duo distille sa musique depuis quelques années (à deux ou en solo) sous l’escarcelle du label Coffee Break Records de ACatCalledFRITZ.

À la veille de leur passage au festival Terre(s) Hip Hop, qui a déjà débuté au Canal 93 de Bobigny, on a eu l’occasion de les rencontrer.

 

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L’INTERVIEW

 

L’EP est en lien direct avec l’album qui était sorti en 2013. Pourquoi avoir ressorti le projet du placard ?

Lemdi : C’était un truc qu’on voulait faire depuis longtemps. C’est vrai que ces trois dernières années, on s’était un peu dispersés dans différents projets. Du coup, ça a pris plus de temps que prévu. Ça aurait dû sortir plus tôt c’est vrai, au moins fin 2015 mais bon c’est la réalité de l’indé. On a aussi pris le temps pour bien sortir l’EP et bien le promouvoir.

Pourquoi vous n’êtes pas partis directement sur un album ?

Moax : C’est une bonne question. On a eu plein de projets en même temps, notamment des projets scéniques avec des musiciens. Ça nous a fait grandir sur plein de points. L’EP de remixes nous tenait à cœur car on avait croisé plein de gens et on avait envie de collaborer avec eux. Mais finalement, on n’avait pas réussi à finaliser ces collaborations. Des mecs comme DJ Damage ou Dusty, on les croisaient depuis longtemps et on avait jamais eu la chance de travailler avec eux. Et quand on a eu l’occasion, on la saisit. Finalement on a pu concrétiser ces collaborations avec les remixes. De plus, on a fait la promotion de l’album « Négropolitain » pendant pas mal de temps sur scène. Dans la longueur, ça a l’air énorme mais pour nous c’était naturel.

De quoi boucler la boucle.

Lemdi : C’est exactement ça. On voulait vraiment aller au bout de l’aventure en sortant également une version vinyle qui nous tenait à cœur.

En même temps, avec les remixes, le titre inédit et les instrus en face B, on a affaire à quelque chose de nouveau.

Lemdi : Le titre inédit est aussi là pour donner un avant-goût de notre prochain projet. On l’a sorti pour que le temps entre les deux ne soit pas trop long.

En parlant de Damage et de Dusty, est-ce que vous considérez que votre musique est dans la continuité des Jazz Liberatorz ?

Lemdi : Quand on a parlé de collaborer ensemble, Damage nous a dit que c’était logique qu’on travaille ensemble. De cette façon oui on est dans la continuité des Jazz Lib. D’autant plus qu’on a une connexion assez forte avec la Meauxtown (ndlr : la scène de Meaux). Depuis un moment, on se reconnait dans leur musique et ils se reconnaissent dans la notre.

 

 

Entre Meaux et le Val Mobb, vous avez réussi à créer une identité hip hop façon golden years avec des teintes jazzy.

Moax : C’est parce qu’on travaille avec des gars de Coffee Break Records, comme ACatCalledFRITZ ou Rico qui sont tous musiciens. Cette identité est comme ça car on la joue comme ça. C’est le son de chez nous. On tire tous dans le même sens même sur certains projets on s’écarte un peu.

Lemdi : On est quand même des genres d’OVNI par rapport au paysage autour de nous. Parce qu’on continue à évoluer dans cette couleur musicale. On aime toucher à tout mais c’est vrai que cette tendance est vraiment à nous.

Il y a un autre invité de marque en la personne de l’anglais Johnny Cuba. Il y a une connexion avec l’Angleterre que avez l’air d’apprécier.

Lemdi : A fond. Notre producteur ACatCalledFritz avait déjà travaillé avec Audessey sur « Beats Per Minute ». Audessey fait partie du collectif Soundsci comme Johnny Cuba. Ollie Teeba de The Herbalizer fait aussi partie du groupe. C’est comme ça que ce lien s’est fait entre nous. Pour l’anecdote, Johnny Cuba parlait un peu français et il avait été touché par les textes du morceau « Le Profit » et c’est pour cette raison qu’il avait choisi le titre.

 

 

Vous leur avez donné le choix des morceaux à remixer ?

Lemdi : Pas trop. On les a un peu aiguillé. Par exemple, Dusty c’était sûr qu’il allait remixer « Négropolitain ». Il nous a même proposé deux versions. Damage a lui choisi son titre. Johnny Cuba a choisi le sien en fonction des textes et du coté punchy du morceau. Et pour The Last Genius, on voulait trop un remix de sa part et on l’a orienté vers « Kick Sale ».

 

 

En parlant de Soundsci, même dans vos collaborations, vous cherchez toujours le coté organique de la musique.

Lemdi : Tout à fait. On a commencé avec Artisans du Mic et déjà on se retrouvait toujours sur des plateaux qui n’étaient pas hip hop. On se retrouvait avec des gens qui faisaient du rock, du reggae et d’autres styles. Et comme on l’a dit, on a toujours évolué avec des musiciens. Quand on a commencé l’aventure de « Négropolitain », l’ajout de musiciens était évident. On aime ce grain et on le recherche constamment.

Parlons maintenant de ce track inédit « Comme Tout Le Monde ». Il représente la passerelle entre le passé et votre futur projet. En quoi il représente votre avenir ?

Moax : Ce projet qu’on est en train de fignoler va être quasiment exclusivement réalisé avec ACatCalledFRITZ, ce qui va donner une certaine couleur. « Négropolitain » était le début de l’aventure avec lui et on va passer à l’épisode n°2. Avec lui et Coffee Break Records, c’est la couleur qu’on veut envoyer.

 

 

Une véritable collaboration à trois.

Lemdi : Exactement. A un moment on s’est même demandé si on devait pas s’appeler « LemdiMoaxFRITZ » ou quelque chose comme ça. On habite à coté les uns des autres et on a la chance de se voir régulièrement. On se partage plein de choses, lui quand il vient de faire un beat ou nous quand on vient de terminer un couplet. On le fait d’une manière directe et spontanée. On a bien sûr l’envie de nous ouvrir à d’autres producteurs mais pour le moment, ça se fait naturellement avec Fritz. En fait, on travaille en famille avec toute la famille de Coffe Break Records.

On va retrouver la notion de « Négropolitain » dans le prochain album.

Moax : Oui mais sous différents aspects. De toute façon, notre musique ne parle que de notre réalité et de notre quotidien. Négropolitain est une vision des choses de notre point de vue de personnes tiraillés entre nos deux cultures. On va retrouver ça dans le nouvel album car c’est nous et on ne va pas changer de discours.

C’était en 2013. Il y a des choses qui ont quand même changé.

Lemdi : Bien sûr. L’album va refléter notre nouvelle expérience. Ce projet pourrait s’appeler « Nouveau Départ ». Partir sur un nouveau disque n’est pas évident car on a tout donné sur le précédent. Notre expérience fait qu’on a encore plein de choses à dire. Même au niveau de la musique ou de notre façon de rapper, cela a évolué. On ne peut pas fournir un deuxième « Négropolitain ».

Vous pouvez nous dire quand vous prévoyez de sortir l’album ?

Lemdi : Tu sais, nous on est Antillais (rires)… Ce que je peux te dire c’est qu’on a déjà une dizaine de maquettes. On peut dire que c’est déjà prêt. On va sûrement sortir en vinyle car on aime beaucoup ça avec Coffee Break Records. De plus, on ne veut pas taper dans des formats super longs mais ce sera consistant. Mais pour répondre à ta question, ça sera sûrement dans le cours de l’année prochaine.

Au sein de Coffee Break Records, vous avez incorporé Les Nouveaux Mutants, groupe qui réunit plusieurs artistes. Le style est annoncé comme plus rugueux. Dans quelle mesure ?

Lemdi : On parlait des trois ans d’écart entre l’album et l’EP de remixs. Et bien on l’a notamment passé à élaborer ce genre de projet. C’est plus rugueux car on a travaillé sur des prods un peu plus méchantes et qui rentre un peu plus dedans. Il y a une partie des Nouveaux Mutants qui travaille plus sur l’analogique donc ils envoient ce qu’on appelle du rap punk. Nous on est rentré un peu plus dans la fantaisie. On a un champs lexical qui va autant dans l’ésotérisme que dans la science. Sur le sampler « Bestioles » qui vient de sortir et dans lequel on voit ce que prépare Les Nouveaux Mutants. Quand on travaille avec ce groupe là, on n’est même plus Lemdi & Moax.

On vous retrouvera donc le dimanche 23 octobre au Canal 93. D’autres dates sont-elles prévues ?

Lemdi : On sera au Downtown Café le 1er décembre et le 3 décembre au Pub ADK près de chez nous.

Mais avant cela, rendez-vous dimanche à Bobigny.

Lemdi : A dimanche.

Moax : Merci.

 

 

L’EP « Comme Tout Le Monde (Négropolitain Remix EP) » est toujours disponible sur le Bandcamp de Lemdi & Moax.

 

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TRACKLISTING :

01. Comme Tout Le Monde
02. J’me Fais Pas d’Idées (Mr Bop remix)
03. Le Profit (Soundci remix)
04. Négropolitain (Dusty remix)

Coffee Break Records – Mai 2016