JAZZY BAZZ : RAP ULTRA

Avec son dernier clip en date « Ultra Parisien », Jazzy Bazz avait attiré l’attention de certains grands médias (et c’est tant mieux) de part le sujet du morceau : le PSG. Une exposition qui est toujours bienvenue mais dont le rappeur Parisien n’avait pas forcément besoin vu sa réputation déjà solide auprès des amateurs de rap. Ceux là même savent que son talent ne se limite pas à manifester devant les grilles du Parc des Princes.

En plus de ses participations aux raps contenders et à son affiliation au collectif de L’Entourage, Jazzy Bazz avait déjà marqué les esprits en solo avec entre autres l’EP « Sur La Route Du 3.14 » paru en 2012. Et cela faisait plusieurs mois qu’il teasait sur ce premier album « P-Town » qui est dans les bacs depuis quelques jours. Des frappes chirurgicales à base de clips de qualité et une relation très étroite avec ses fans sur les réseaux sociaux.

On a eu le plaisir d’échanger quelques mots avec lui.

 

 

L’INTERVIEW

 

Tout d’abord, comment s’est passée la release party du 26 février ?

Très bien. C’était juste une petite soirée avec la famille pour célébrer la sortie de l’album. C’était une journée chargée qu’on a tâché de bien terminer. On a fêté la fin du projet pour nous. Même si on doit maintenant le défendre sur scène, j’ai déjà la tête au prochain.

Tu avais déclaré avoir perdu l’inspiration pendant deux ans. Est-ce vrai ? Et si oui, était-ce juste après l’EP « Sur La Route Du 3.14 » ?

Je ne me l’explique toujours pas. J’étais dans un cercle vicieux. J’étais pas bien dans ma vie personnelle et je ne pouvais même pas me réfugier dans l’écriture, ça ne venait pas.

Comment c’est revenu ?

Avec le temps. J’ai repris peu à peu goût aux choses. Quand je me suis senti bien, j’ai recommencer à travailler. J’ai repris du plaisir à écrire. C’était important pour moi car je considère la musique comme un vrai travail et pas un loisir.

Tu es un adepte des rap contenders. C’est résolument un exercice différent d’un enregistrement en studio.

Ça fait un moment que j’en n’en ai pas fait un. Les rap contenders c’est pour se marrer alors qu’en studio c’est du sérieux. C’est comme le basket et le foot, on joue avec un ballon pour marquer mais l’un se joue à la main et l’autre au pied. Le seul point commun est la recherche de la rime mais la comparaison s’arrête là.

Malgré tout, tu as utilisé quelques techniques des rap contenders pour réaliser le disque comme l’improvisation ou l’enregistrement en one shot ?

Il m’arrive régulièrement de modifier un texte directement en cabine quand je me rend compte que ce que j’avais écrit ne fonctionne pas au moment d’enregistrer. Par contre j’ai une technique bien particulière pour les couplets. J’en enregistre plein à la suite et en one shot, et je retiens les meilleurs à la fin. A chaque fois, je me retrouve avec un gros stock de couplets non retenus.

Tu as enregistré l’album au studio Grand Ville. Et tu as la chance d’être entouré d’amis qui sont qui – plus – est des professionnels de la musique.

Grave. Que ce soit l’enregistrement, le mixage ou le mastering, tout a été fait par des potes, par la famille. J’en profite pour passer une dédicace à Lionel Elsound qui a mixé l’album. C’est un ami du lycée et c’est pour moi le meilleur de sa génération. Un gros big up à toute l’équipe qui a fait un gros taf.

 

« Avec mes potes, on est trop méchants entre nous. Ils me diront toujours ce qui ne va pas. »

 

Mais ce n’est pas un peu risqué de ne travailler qu’avec des potes ? Sont-ils assez objectifs sur ta musique ?

Mais on est trop méchants entre nous. Même si on est potes, on n’hésite jamais à se critiquer. Ils me diront toujours ce qui ne va pas parce que c’est des pros avant tout. C’est comme ça qu’on avance. On se force mutuellement à être exigeants.

On voit cette exigence dans tes clips. On peut vraiment dire que vous vous êtes donné les moyens. Tu as une attente particulière pour cet album ?

Qu’il soit pressé. J’ai voulu faire un truc complet avec des clips et un vinyl. Je veux que l’album voyage un maximum. Concernant les clips, c’est un des moyens de communication les plus forts aujourd’hui. En plus, j’aime bien le cinéma. J’aime bien le travail de créativité, l’écriture d’un scénario, la mise en ambiance, raconter une histoire etc. Et encore une fois, ce sont des potes qui ont réalisé les vidéos.

Les sonorités de l’album sont différentes : une boucle de piano à la Mobb Deep et une ambiance Wu-Tang sur « Le Roseau », les influences nu-soul sur « 3h33 » et « Les Chemins », un beat façon Gloden Years sur « Fluctuat Nec Mergitur ». En fait, « P-Town » est une sorte de carte de visite de tout ce que tu sais faire.

C’est non seulement une carte de visite de ce que je peux créer, mais c’est aussi mes goûts, ce que j’aime écouter. Je voulais mettre dans ce premier album un mix de moi. Je voulais mettre en avant aussi bien ma ville que ce que je suis.

 

Freddie Gibbs apparait sur « Lay Back ». Tu avais saisi une opportunité de l’avoir ou tu avais déjà pensé à lui avant ?

Les deux. Je l’écoute beaucoup et il fait partie des rappeurs avec qui je rêvais de travailler. Mais il s’est avéré que j’ai pu rencontrer Maxime, son tourneur en Europe, qui m’a permis de rencontrer Freddie lors de ses deux derniers passages en concert. On a discuté en backstage et cela a commencé comme ça. C’est dingue, je n’aurais jamais pensé que cela pourrait arriver un jour.

Ça s’est passé comment ensuite ?

Maxime a tout organisé pour moi. Freddie a enregistré à Lyon à l’occasion d’un concert là bas. Il a fait ça au studio de mon pote Lino. Je lui avais envoyé quelques instrus et il a choisi celui de « Lay Back ». Il m’a mis la pression car son couplet étant dangereux. Un grand merci à lui et à Maxime qui ont tout fait pour moi.

Lui, Esso Luxueux et Bonnie Banane sont les « seuls » featurings. C’est étonnant pour un mec qui a autant d’amis.

C’est justement ça le problème. Mes potes sont trop nombreux pour que je les invite tous (rires). Je ne les oublis pas mais j’en ai choisi trois. Sinon ce n’est plus un album solo. Plus de trois feats c’est trop lourd.

 

« C’est notre génération qui doit rendre fiers les nouvelles générations de nos symboles. »

 

P-Town est une ode à ta ville : Paris. Le lendemain des attentas de novembre, tu avais hésité à publier sur tes pages le drapeau français. Tu as finalement choisis de le faire en appelant à nous le réapproprier.

Je suis attaché à ma ville et surtout à mon quartier. Tout le monde avait réagit avec ce drapeau et j’ai trouvé ça positif. Moi qui avait toujours associé le drapeau français aux fachos qui l’avaient récupéré depuis des années. Je côtoie les quartiers et les tribunes de foot, j’ai toujours milité contre les fachos et la récupération qu’ils font des symboles du pays. Le drapeau est le symbole le plus fort. Dommage qu’il soit aussi récupéré par les politiques. Mais voilà, je me devais de réagir moi aussi. C’est notre génération qui doit rendre fiers les nouvelles générations de nos symboles.

Tu n’as pas fait que ça. Tu as aussi écrit « Fluctuat Nec Mergitur ».

Oui. J’ai écrit ça en 3 ou 4 jours. Je ne pouvais m’exprimer qu’en musique. J’étais à la fois blessé mais aussi inspiré. Quelques semaines plus tard, on avait réalisé le clip.

 

Autre sujet. Ton morceau « Ultra Parisien » est explicite. Ça en est où les discussions avec la Direction du PSG pour réintégrer les Ultras ?

Il parait qu’ils cherchent des gens pour mettre de l’ambiance avec de la musique. Ils se rendent bien compte qu’il n’y a plus d’ambiance au Parc. Mais je ne pense pas qu’on reverra les Ultras dans le stade d’aussi tôt.

 

Comment tu vois le match retour du PSG contre Chelsea en Ligue des Champions ?

Ça va être chaud. On a toutes les chances. C’est du 60/40 pour Paris. Mais il faudra faire gaffe. Il leur suffira d’un but.

Tu iras te produire à Marseille le 12 mars. La rivalité entre les deux villes n’est que footballistique finalement ?

J’ai de la famille et des amis à Marseille. Mais tu sais, il y a de la solidarité entre ultras. La rivalité est saine et j’aime bien ça. Pendant un match, il nous arrive de rendre hommage à quelqu’un qui est décédé dans le camp adverse et de se vanner comme des chiens après. En tout cas, ce que nous avons en commun, c’est qu’on est solidaires face à la répression de la police ou des instances du foot. Alors j’invite les Marseillais à venir me voir à l’Affranchi et on fera la fête tous ensemble.

Un grand merci pour cette interview.

De rien et big-up à 90bpm que j’ai beaucoup suivit à une époque.

Et bien la connexion est de nouveau faite.

C’est clair.

 

L’album « P-Town » de Jazzy Bazz est disponible sur l’ensemble des plateformes. Choisissez la votre sur ce lien.

 

JzzyBazz_PTown

TRACKLISTING

01. P-Town
02. Les Chemins
03. Joker
04. Lay Back (feat. Freddie Gibbs)
05. 3h33
06. Ultra Parisien
07. 3.14 Boogie (feat. Esso Luxueux)
08. Le Syndrome
09. Visions (feat. Bonnie Banane)
10. Adrénaline
11. Le Roseau
12. Trompes de Fallope
13. 3.14 Attitude
14. Amen
15. Fluctuat Nec Mergitur

Grand Ville – 2016