BLITZ THE AMBASSADOR : « You got a city behind you, I got a continent ! »

En préambule d’un troisième album qui s’annonce des plus appétissant, Blitz The Ambassador lâche sa foudre vindicative sur les sept titres de The Warm-Up, EP en téléchargement gratuit.  Puissamment escorté de gardes du corps en armures cuivrées, l’Ambassadeur plante le drapeau Ghanéen partout où il passe. Rimes acérées et  flow 4×4, fond comme forme, Blitz l’Africain devenu New-Yorkais ne néglige aucune facette du taf du MC.

Pourquoi ce EP en téléchargement gratuit ?
L’idée était de permettre à ceux qui ne connaissaient pas ma musique d’y avoir accès. Quand tu sors un album, tu n’es jamais sûr de pouvoir toucher un nouveau public, là, en mettant ce EP en téléchargement quelques mois avant l’album, ça nous permet de leur montrer qui on est. Parfois, des artistes sortent des EP en y mettant les titres les moins bons et en gardant les meilleurs pour l’album, là, c’est pas le cas. C’est vraiment bien représentatif de mon travail. Bien sûr, l’album sera plus complexe.

Malgré la gratuité, on peut le commander mais uniquement en vinyle. Pourquoi ? Parce que le vinyle est finalement la racine du hip hop ?
A mort. Mais je crois que les gens apprécient finalement plus le vinyle qu’ils apprécient le cd. Si tu achètes un vinyle, tu vas le garder parce qu’en plus, il y a une attirance nostalgique. Cet EP ne sortira qu’en vinyle et pas en cd, pour lui donner plus de valeur.

Tu n’es pas du genre égoïste, tu partagse facilement ton mic…
L’histoire que je raconte, je ne peux pas la raconter seul. C’est une grande histoire qui doit être tout le temps en mouvement et qui doit être renforcée par l’apport d’autres africains qu’ils y habitent encore ou qui l’aient quitté.  Mais ça n’est même pas obligatoire d’être africain, l’important c’est les idées et la vision sur les problèmes du monde et la façon dont il évolue. C’est ce qui m’a amené à collaborer avec 20Syl qui est un rapper dont j’apprécie le travail et qui surtout comprend ce qu’on veut faire. Pareil pour Nneka, pour Fashwan… Pour moi, le but est d’avoir le plus de voix possibles dans la conversation et d’avoir des points de vue différents sur les choses et pas uniquement le mien.

On trouve beaucoup de samples de voix pas innocents. Raekwon, Busta, Mos Def, Gil Scott-Heron, Jay-Z, est-ce que pour ce genre de samples, tu recherches toujours la bonne rime qui sort de la bonne bouche ?
La raison pour laquelle je les ai samplé sur ce EP, c’est que si je l’avais fait sur l’album, j’aurai été obligé de payer pour ça ! Le EP est gratuit, je ne risque rien ! (rires) Je suis un grand fan de hip hop et toute ma vie j’ai écouté des MC’s et surtout ce qu’ils avaient à dire. Certaines rimes comme le « respect mine » de Raekwon trainent dans ma tête depuis 1996-97. Je m’étais toujours dit que si jour j’avais l’opportunité de le placer sur un disque je le ferai. Idem pour celle de Mos Def. C’est vraiment ça, je cherche la rime qui a vraiment un sens…

En studio, tu samples et tu programmes ; sur scène c’est du 100 % live. Ca ne fait pas double travail pour adapter le studio à la scène ?
C’est un sacré boulot. Mais dans tous les morceaux que je fais, je m’assure qu’il y ait des éléments live dedans qui font que dès le départ, j’ai déjà structuré une partie des arrangements live. En arrivant sur scène, une partie a déjà été bossée un studio et ça rend les choses un peu moins difficile. C’est un peu moins le cas sur cet EP, mais sur Native Sun par exemple, il y avait beaucoup d’éléments live.

Mais du coup ceux qui ne connaissent que tes albums et ceux qui te voient uniquement en concert ne voient pas le même artiste. Ils ne voient qu’une face chacun alors qu’il y en a deux…
Il y en a même plus que ça ! A mon avis, quand tu fais un album, le but est ensuite d’aller le défendre sur scène. L’énergie dépensée en studio pour l’enregistrement est une dépense « calculée », en live tu te nourris de l’énergie du public. Un titre qui sonne un peu mellow sur l’album peut devenir survolté sur scène en fonction des réactions du public ! J’encourage les gens à venir me voir sur scène parce qu’il y a beaucoup à gagner à venir me voir live pour comprendre exactement ce que je veux faire passer.

Souvent le rap en live c’est ingrat : des mc’s qui braillent, qui manquent de souffle. Toi, on dirait que tu veux tuer la concurrence dans ce domaine !
Yeah ! Mais le live c’est tout ce que j’ai ! Je veux dire par là que je n’ai aucun soutien radio, aucun hit en rotation donc, je considère les concerts comme la seule opportunité que j’ai de convaincre un nouveau public. Avec mon groupe, on cravache vraiment pour avoir un show qui fasse qu’en une heure et quelques, on contente ceux qui nous connaissent déjà et ceux qui viennent nous voir pour la première fois. Je prends ça très au sérieux.

Tu m’avais d’ailleurs dit une fois être satisfait de ton show à 60 %. Où en es-tu maintenant ?
Allez… je te dirai 70 %… Mais on y travaille encore ! Je vais à beaucoup de concerts voir des artistes différents pour voir un peu ce qui se fait ailleurs. Ce que Jay-Z fait, ce que les Roots font… quand je vois ça, je suis comme un étudiant qui est là pour apprendre ce qu’il faut faire et ce qu’il ne faut pas faire ! Je perfectionne continuellement le show, mais le jour où on sera à 100 %, crois moi que là, tu n’auras même pas à me le demander. Tu sauras !

« It’s just a warm-up, imagine what the album like », donc je te pose la question : à quoi va ressembler l’album ?
C’est le truc le plus abouti que j’ai fait jusqu’à présent. Plus que ce que j’ai pu faire auparavant, Afropolitan Stories raconte vraiment une très bonne histoire. J’adore les histoires, mes albums préférés sont ceux qui racontent des histoires, ceux qui dès les premières minutes te donnent l’impression de regarder un film mais où la musique est à la fois le son et l’image. Pour cet album, j’ai enregistré beaucoup de skits et d’éléments qui donnent une dimension cinématique à l’ensemble. Faudra que tu l’écoutes pour te faire ton opinion mais j’en suis vraiment très fier. Les guests ont énormément contribué à raconter cette très bonne histoire. Il y a Angélique Kidjo, que j’écoute depuis que je suis gosse, grosse fierté pour moi de l’avoir sur mon album ! Il y a également Oxmo, je l’ai entendu la première fois que je suis venu en France en 2010. Au début je n’ai évidemment rien compris à ses textes, mais quand on me les a traduit, je l’ai trouvé vraiment incroyable, je suis vraiment très heureux qu’on ait pu faire quelque chose ensemble. J’ai presque terminé cet album…

J’ai parfois l’impression que tu es de cette race de Mc Old-Timer comme on en trouvait dans les 90’s. Et un peu moins aujourd’hui…
En fait, je crois que ça dépend surtout du moment où tu es devenu fan de hip hop. En ce qui me concerne, on était en plein dans le contenu lyrical, le commentaire social, le beat heavy, la qualité musicale. Les trucs comme ceux que faisaient Guru ou les Fugees au début. J’avais une douzaine d’années et pour moi, encore aujourd’hui, c’est comme ça que doit être le hip hop. J’essaie donc de faire en sorte que ceux qui y viennent aujourd’hui puissent dire la même chose de moi. Je fais partie des chanceux arrivés dans le hip hop à l’époque des Rakim, KRS One, Chuck D. Aujourd’hui la mentalité est globalement différente : les lyrics sont moins précis, le contenu moins social et les histoires moins intéressantes…


Propos recueillis le 22.10.13 par Real Muzul

the warm up ep (1)

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Il sera en concert à la Flèche d’Or ce vendredi 25 octobre, par ici !