Clear Soul Forces « Gold PP7s »

La faillite de detroit, tout le monde en a entendu parler. Le bad trip de l’american dream, le sombre tableau d’un capitalisme démesuré et éphémère. Une classe ouvrière de plus en plus appauvrie, des rues laissées à l’abandon, mais une population qui sait se réunir et se serrer les coudes. La plus belle force de Motorcity est indiscutablement sa scène artistique : depuis la fabuleuse Motown de Berry Gordy, en passant par l’influente House de Juan Atkins jusqu’au hip hop de Dilla. Peu importe la situation économique de Detroit, prospere ou sombre, cette ville restera à jamais un grand chapitre de l’histoire musicale. Et ces 4 membres de Clear Soul Forces sont le bel exemple de cette rage de réussite qui règne dans une cité meurtrie.

Mais qui parle de Buzz? Quelles sont ces personnes qui oseront réduire un talent à ce mot répugnant ? Les 2 millions de vues de Get no Better ne sont pas un hasard. Les Clear Soul Forces récoltent actuellement une forte adhésion de la communauté hip hop qui est très largement méritée. Formé sous l’impulsion du emcee vétéran Royce 5’9″ (qui a eu un bon flair!) , ce crew composé par L.A.Z., E-fave, J-Roc et Ilajide est dans la lignée de Slum Village ou de l’école Native Tongues. Ces 4 emcees complémentaires propagent un rap puissant, un rap que les blogs aiment définir comme boom bap. Ils ont déjâ plusieurs coups d’essais (plus ou moins réussis), avec sur certains projets des collaborations de Hudson Mohwakee ou de Nameless (cousin de Black Milk à suivre de très près) . Et depuis leur précédent LP « Detroit Revo(lution) » qui a confirmé cette bonne alchimie, leur prochain album officiel (sur FatBeat) était guetté par un grand nombre d’entre nous.

Le voila enfin dans nos oreilles ce tant attendu Gold PP7s. La majorité des beats sont produits par Ilajide (emcee et beatmaker). Avec un sans faute coté flow, les 4 « fant-as-tics » se complètent et entremêlent leurs lyrics avec une aisance vraiment déconcertante. La très légère déception se situe au niveau des beats : Souvent similaires dans la construction et parfois trop simplistes en composition, comparés au précédent opus. Mais la fusion qui opère sur toute la tracklist atténue cette faille.  Ces 4 fans de jeux vidéo nous mettent dans le bain dès le premier morceau en utilisant des sons 8 bits pour un rap très accrocheur. Un peu plus tard, ils sampleront intelligemment du Fela Kuti. Clear Soul Forces explorent donc différents horizons, peut être se cherchent-ils un peu trop? Une bonne énergie sur des tracks comme « Ninja Rap », « Beats rhymes and life » ou  « We be runnin’this », qui forcément engendreront un balancier latéral entre vos épaules et votre nuque. Coté guest :  les Kooley high sur le morceau phare Freq Freq, mais aussi  les dernières fraicheurs du beatmaking 14KT et Dibia$e.

En somme : un hommage à la golden area et une belle vision du hip hop tout au long de l’album.

Nos 4 minots ont vraiment toutes les cartes en mains pour devenir un groupe emblématique du hip hop de Detroit, voire du hip hop tout court. Ils ont pris leurs envols, ils prennent du bon temps (ceux qui les ont vu sur scène nous confirmeront), donc tout devrait bien se passer. Ils ont dans leur backpacks un bon dossier pour entamer cette rentrée 2013. Long life CSF.

Ben Filliat

 Clear Soul Forces Gold PP7s / Sorti le 16 septembre chez Fat Beats